quand on l'ajoutera à une solution d'un sel de strontiane, alors que précédemment il n'avait donné, avec le même sel, aucun précipité. Le bichromate de potasse lui-même est moins sensible que le chromate neutre de strontiane, ce qui résulte de ce que le chromate de baryte est légèrement soluble dans l'acide chromique et les acides faibles, en présence des sels de strontiane; cette solubilité peut être démontrée de la manière suivante: on prend une solution contenant quelques centigrammes d'un sel de baryte pour un litre d'eau; on divise cette solution en deux parties, dont l'une est saturée par un sel de strontiane pur (nitrate, chlorure, etc.); on ajoute alors dans les deux liqueurs du chromate de strontiane; on voit apparaître, dans chacune d'elles, le même précipité; mais si l'on ajoute, dans les deux liqueurs, 1 ou 2 gouttes d'acide acétique, le précipité disparaît dans celle qui a été saturée par un sel de strontiane, tandis qu'il persiste dans l'autre. D'après M. Cannepin, le procédé de M. Ludeking (1), qui consiste à ajouter de l'acétate de soude au bichromate de potasse, est loin de présenter la même sensibilité que le chromate neutre de strontiane. Outre son manque de sensibilité, le bichromate de potasse présente encore l'inconvénient suivant : il arrive souvent que les sels de strontiane contiennent un excès d'hydrate de strontiane; dès qu'on ajoute à une solution de ces sels quelques gouttes de bichromate de potasse, ce sel forme, avec l'hydrate de strontiane en excès, un chromate neutre de strontiane, tandis qu'il se transforme lui-même en chromate neutre de potasse. Cette erreur est d'autant plus facile à commettre qu'on a conseillé de chauffer la solution additionnée de réactif et que le chromate de strontiane est moins soluble à chaud qu'à froid. L'emploi du chromate neutre de strontiane ne comporte aucune cause d'erreur, si l'on a soin d'observer les précautions suivantes : 10 Si l'on opère sur une solution saturée de sel de strontiane, pour y rechercher la baryte, il faut se servir d'une solution de chromate de strontiane, préparée à chaud, car ce sel est moins soluble dans les sels de strontiane que dans l'eau distillée froide; 2o On doit s'assurer que le sel à essayer est neutre ou alcalin par un excès de strontiane ; (1) Voir Répertoire de pharmacie, février 1892, page 56. 3o Il faut éviter la présence des sels ammoniacaux. Avec le chromate de strontiane, la réaction est complète au bout de dix à quinze minutes. Préparation du sulfate de quinine pur et léger; Les fabricants qui ont préparé du sulfate de quinine dépourvu de cinchonidine ont livré, jusqu'ici, du sulfate de quinine lourd; or, le public n'accepte pas toujours volontiers ce sel, qui n'a pas l'aspect de celui auquel il est accoutumé. M. Yvon a proposé, en 1887, le moyen de préparer un sulfate de quinine chimiquement pur et léger (2); dans la séance de la Société de pharmacie de Paris du 4 novembre 1891, M. de Vrij a annoncé qu'il était parvenu, au moyen d'un tour de main, à préparer également un sel pur et léger (3). M. Carles propose, à son tour, un autre procédé, dont le principe est connu et consigné dans les livres classiques (Soubeiran et Regnauld, 8e édition, page 28). Si l'on introduit dans un tube à essais 10 ou 20 centigrammes de sulfate de quinine et de l'eau en quantité suffisante pour le remplir aux deux tiers, le sel se dissout; on ajoute dans la liqueur quelques cristaux de sulfate d'ammoniaque; on retourne doucement le tube jusqu'à dissolution du sel ammoniacal, et le liquide se remplit aussitôt de cristaux déliés qui occupent tout le tube. Ces cristaux sont des cristaux de sulfate de quinine, et non de sulfate double de quinine et d'ammoniaque, comme l'ont prétendu certaines personnes. En effet, le sulfate d'ammoniaque exerce une simple action physique; il diminue brusquement le coefficient de solubilité du sulfate de quinine et il amorce la cristallisation, sans entrer en combinaison; ce qui le prouve, c'est qu'on retrouve intégralement le sulfate d'ammoniaque dans les eaux mères et que le sulfate de quinine ainsi recristallisé, après clarçage et essorage, n'influence nullement le réactif de Nessler, si sensible à l'action des sels ammoniacaux. Pour faire l'application de ce qui précède à la cristallisation du sulfate de quinine industriel, on peut procéder de deux façons: 1o Lorsque le sulfate de quinine comprimé a été redissous dans les 30 parties réglementaires d'eau bouillante, on arrête la chaleur; on projette dans la bassine du sulfate d'ammoniaque en cristaux ; (1) Bulletin de la Société chimique du 20 février 1892. (2) Voir Archives de pharmacie, année 1887, page 182. on agite pour dissoudre le sel ammoniacal et disséminer le duvet quinique formé dans toute la masse; on laisse en repos, et on termine les opérations subséquentes comme d'habitude. 2o On peut, de préférence, saturer à part, à 50 ou 60 degrés, un volume d'eau représentant le dixième au plus du grand cristallisoir, avec du sulfate de quinine pur; lorsqu'on arrête le feu, on ajoute au liquide à 60 degrés la quantité voulue de cristaux de sulfate d'ammoniaque; on brasse; il se forme une bouillie épaisse, qu'on mélange au grand bain, lequel se solidifie en quelques minutes. Il ne reste qu'à laisser refroidir et à suivre les autres traitements d'usage. Afin d'obtenir le maximum d'effet, le sulfate d'ammoniaque doit être projeté, non à l'état de solution, même concentrée, mais à l'état de cristaux, dans la solution concentrée de sulfate de quinine; de plus, les cristaux doivent être assez gros et sans débris, pour que leur dissolution, au contact de la quinine, s'opère lentement. La proportion de sulfate d'ammoniaque qui a paru donner les meilleurs résultats est de 4 grammes par litre. L'emploi de ce procédé présente l'avantage de diminuer de moitié environ la proportion de sulfate de quinine qui reste dans les eaux mères, ce qui augmente le rendement de 65 grammes environ de sel pur par hectolitre de liqueur. Les expériences de M. Carles ont été faites en petit, avec le matériel des laboratoires d'essais, mais les résultats se sont produits avec une telle facilité qu'il considère le succès comme presque certain au cours d'une fabrication industrielle. L'analyse optique et chimique des beurres ; Directeur du Laboratoire de la Bourse du Commerce (1) (Extrait). Nos lecteurs connaissent l'oléoréfractomètre de MM. F. Jean et Amagat, dont nous avons signalé les applications dans ce Recueil (années 1889, page 490; 1890, page 211; 1891, page 119), et ils se rappellent que cet instrument a été présenté par M. F. Jean comme permettant de déceler la présence de la margarine dans le beurre. Quelques critiques ont été adressées à l'oléoréfractomètre, auquel certains chimistes reprochent de donner, dans des cas déterminés, de fausses indications. (1) Moniteur scientifique de février 1892. M. F. Jean a cru devoir relever ces critiques dans un article que nous regrettons de ne pouvoir reproduire in extenso, à cause de ses dimensions. L'analyse optique du beurre est basée sur ce fait d'observation : à l'oléoréfractomètre, le beurre pur normal dévie de 30°; une addition d'huile ou de graisse étrangère diminue la déviation d'une quantité qui varie suivant la quantité et le pouvoir optique de l'huile et de la graisse ajoutée. Les huiles de palme et de coco sont les seules matières grasses qui soient susceptibles d'augmenter la déviation du beurre. L'huile de lin, qui a un pouvoir optique de +36°, présente, avec le beurre, un écart de 76°; le pouvoir optique de l'huile d'arachides s'écarte de celui du beurre de 33 à 35o, tandis que celui de la margarine pure ne diffère de celui du beurre que de 13 à 14°. On comprend donc qu'une très petite proportion d'huile ajoutée au beurre puisse produire une déviation beaucoup plus considérable que ne le ferait une addition plus forte de margarine pure. Sous le nom général de margarine, on désigne des produits renfermant des proportions variables de beurre et d'huiles diverses (lin, coton, sésame, arachides, etc.); l'oléoréfractomètre ne saurait donc fournir des résultats quantitatifs et il ne peut qu'indiquer si un beurre est pur ou impur; on ne saurait obtenir, au moyen de cet instrument, des indications quantitatives rigoureuses qu'à la condition de connaître la déviation de la matière adultérante. Il est incontestable, ainsi que l'a dit M. Ch. Girard, que la présence d'une petite quantité d'huile dans le beurre gêne le fonctionnement de l'appareil, au point de vue de l'évaluation de la quantité de margarine ajoutée, mais il serait contraire à une juste critique scientifique de reprocher à un appareil qualitatif de ne pas donner, dans tous les cas, des indications quantitatives rigoureuses. Pourquoi ne condamnerait-on pas, en se plaçant au même point de vue, le polarimètre, qui cesse d'être quantitatif en présence d'un mélange de dextrose et de glucose? M. F. Jean discute ensuite une autre critique, consistant à alléguer que les déviations anormales constatées, pour certains beurres, au moyen de l'oléoréfractomètre, constituent une cause d'incertitude pour le chimiste, dans les cas où les procédés chimiques montrent que ces beurres sont purs. A cette objection, M. F. Jean répond qu'en prenant un beurre pur, de déviation 30o, présentant un indice de saponification No III. MARS 1892. 8 (quantité en miligrammes de potasse nécessaire pour saponifier 1 gramme de beurre) =231, et donnant par le procédé RichelMessel-Volny, 28 centimètres cubes pour les acides volatils (quantité de solution alcaline décime nécessaire pour neutraliser les acides volatils de 5 grammes de beurre), on peut ajouter à ce beurre 5 pour 100 d'huile d'archides ou 5 pour 100 d'huile de lin, sans que les chiffres indiqués par les méthodes chimiques s'éloignent sensiblement de ceux qu'on obtenait avec le beurre pur; bien que ces beurres additionnés soient incontestablement impurs, les procédés chimiques sont impuissants à déceler la fraude, tandis que l'oléoréfractomètre permet de la reconnaître, en accusant une déviation inférieure à 30°. On doit donc considérer l'oléoréfractomètre comme un instrument d'une grande sen sibilité. Mais, ajoute-t-on encore, on rencontre des beurres purs qui donnent, à l'oléoréfractomètre, une déviation anormale pouvant faire croire à une fraude qui n'existe pas. Le fait est exact, mais cela résulte de ce que, comme l'a dit M. Kildan, dans une communication faite par lui au 62o Congrès des naturalistes allemands, une partie des matières grasses contenues dans la nourriture des vaches laitières passe dans le lait; or, certains éleveurs ont pris l'habitude d'introduire, dans l'alimentation de leurs vaches, des tourteaux de graines oléagineuses (arachides ou lin); une portion de la matière grasse des tourteaux passe dans le lait et se retrouve, par conséquent, dans le beurre ; elle y existe en quantité insuffisante pour être reconnue au moyen des procédés chimiques, mais on la décèle à l'aide de l'oléoréfractomètre; cet instrument pèche donc par excès de sensibilité. Cet excès de sensibilité doit-il contribuer à proscrire l'usage de l'appareil? Assurément non, car l'analyse chimique, dans les cas où l'oléoréfractomètre donne une déviation anormale, doit intervenir pour contrôler les résultats procurés par cel instrument. Des essais nombreux faits par M. F. Jean, il résulte que, pour les beurres purs, à une déviation optique anormale correspondent des indices élevés de saponification et d'acides volatils, tandis que, pour les beurres fraudés, à une déviation basse correspondent des indices bas de saponification et d'acides volatils et une teneur élevée en acides fixes. Dans des expériences faites devant une Commission de la Société des Agriculteurs de France et de la Société d'encouragement à l'industrie laitière, M. F. Jean a été appelé à donner son opinion sur plusieurs échantillons de beurre pur et margariné qui portaient |