Oeuvres complètes de Guy de Maupassant: Monsieur Parent

Front Cover
L. Conard, 1910
 

Other editions - View all

Common terms and phrases

Popular passages

Page 264 - M'éblouit-elle de clarté? Dieu puissant ! tout mon corps frissonne. Qui vient? qui m'appelle? — Personne. Je suis seul, c'est l'heure qui sonne ; O solitude!
Page 95 - Pourquoi gardons-nous le souvenir si clair, si cher, si aigu de certaines minutes d'amour avec la Terre, le souvenir d'une sensation délicieuse et rapide, comme de la caresse d'un paysage rencontré au détour d'une route, à l'entrée d'un vallon, au bord d'une rivière, (ainsi qu'on rencontrerait une belle fille complaisante.
Page 203 - Vous connaissez les d'Orgemol, ces deux géants, ces deux Normands des premiers temps, ces deux mâles de la vieille et puissante race de conquérants qui envahit la France, prit et garda l'Angleterre, s'établit sur toutes les côtes du vieux monde, éleva des villes partout, passa comme un flot sur la Sicile en y créant un art admirable, battit tous les rois, pilla les plus fières cités, roula les papes dans leurs ruses de prêtres et les joua, plus madrée que ces pontifes italiens, et surtout...
Page 112 - Un peu de moustache sur les lèvres faisait rêver... rêver... comme on rêve à des bois aimés en voyant un bouquet sur une table. Elle avait la taille très cambrée, la poitrine très saillante, présentée comme un défi, offerte comme une tentation. L'œil était pareil à une tache d'encre sur de l'émail blanc. Ce n'était pas un œil, mais un trou noir, un trou profond ouvert dans sa tête, dans cette femme, par où on voyait en elle, on entrait en elle.
Page 263 - Depuis que j'ai senti la solitude de mon être, il me semble que je m'enfonce, chaque jour davantage, dans un souterrain sombre, dont je ne trouve pas les bords, dont je ne connais pas la fin, et qui n'a point de bout, peut-être ! J'y vais sans personne avec moi, sans personne autour de moi, sans personne de vivant faisant cette même route ténébreuse. Ce souterrain, c'est la vie. Parfois j'entends des bruits, des voix, des cris... je m'avance à tâtons vers ces rumeurs confuses. Mais je ne sais...
Page 77 - C'était une voiture jaune, montée sur des roues jaunes aussi autrefois, mais rendues presque grises par l'accumulation des boues. Celles de devant étaient toutes petites; celles de derrière, hautes et frêles, portaient le coffre difforme et enflé comme un ventre de bête. Trois rosses blanches, dont on remarquait, au premier coup...
Page 80 - Tous portaient la blouse bleue par- dessus d'antiques et singulières vestes de drap noir ou verdâtre, vêtements de cérémonie qu'ils découvriraient dans les rues du Havre; et leurs chefs étaient coiffés de casquettes de soie, hautes comme des tours, suprême élégance dans la campagne normande. Césaire Horlaville referma la portière de sa boîte, puis monta sur son siège et fit claquer son fouet. Les trois chevaux parurent se réveiller et, remuant le cou, firent entendre un vague murmure...
Page 78 - ... cette carriole qui avait du monstre dans sa structure et son allure. Les chevaux semblaient endormis déjà devant l'étrange véhicule. Le cocher Césaire Horlaville, un petit homme à , gros ventre, souple cependant, par suite de l'habitude constante de grimper sur ses roues et d'escalader l'impériale, la face rougie par le grand air des champs, les pluies, les bourrasques et les petits verres, les yeux devenus clignotants sous les coups de vent et de grêle, apparut sur la porte de l'hôtel...
Page 162 - Souvent, on rencontre de ces gens chez qui détruire la vie est une volupté. Oui, oui, ce doit être une volupté, la plus grande de toutes peut-être; car tuer n'est-il pas ce qui ressemble le plus à créer? Faire et détruire! Ces deux mots enferment l'histoire des univers, toute l'histoire des mondes, tout ce qui est, tout!

Bibliographic information