vous pouviez comparer et juger. Pourquoi, puisque la question vous paraît si importante, préférez-vous, pour la résoudre, la situation la moins favorable au rapprochement des vues et des lumières ? Je ne me dissimule pas cependant les dangers qui peuvent survenir dans un mois, six semaines, et les risques que peut essuyer le systême représentatif lui-même, dans le cas où actuellement vous passeriez à l'ordre du jour sur cette demande en confirmation. Vos débats ont parcouru la république; les volontés sont averties, et les droits éveillés; celui de faire grâce ou de commuer la peine est un des attributs de la souveraineté que vous ne pouvez exercer, puisque vous jugez. Si la discussion a pu déterminer beaucoup de membres, ici, à penser que la confirmation était nécessaire, pensez-vous qu'elle n'ait pas produit le même effet sur une grande partie des citoyens; et alors la malveillance auraitelle beaucoup à travailler pour les indisposer contre des représentans qui auraient violé leurs droits? La guerre arrive au printemps; les puissances coalisées, qui ne peuvent espérer de succès pour leurs armes, si nous ne nous déchirons pas nous-mêmes, ne manqueront pas de se servir de ce prétexte pour séparer la Nation de ses représentans. A chacun de ses tristes événemens que l'affreuse guerre traîne après elle, à chaque contrée dévastée, à chaque citoyen mutilé, les habitans, les pères, les frères, les amis entendront dire autour d'eux : c'est l'exécution du jugement qui nous a donné la guerre, c'est parce que nos mandataires ont méprisé nos droits. Je sais bien que ceci est absurde, et que les puissances armées pour Louis, le sont en même temps contre la liberté; mais, à mes yeux, c'est quelque chose qu'un sophisme royal qui peut porter un seul village à s'entredétruire. Ainsi, d'une part, les dangers sont dans le principe même, et j'en vois sortir le fédéralisme et la guerre civile. D'autre part, les dangers sont dans les circonstances, et les futurs contingens ne sont pas plus rassurans : eh bien! je les vois disparaître, ces dangers, si vous savez allier le respect pour le principe avec l'intérêt que commandent les conjonctures. S'il faut opter sur la question de faire confirmer ou non actuellement par le peuple, je déclare que je suis pour la négative; je ne veux pas courir le risque de coopérer à la division de la république, dont j'ai juré l'unité. Mais, où serait l'inconvénient d'ajourner la décision de la question après l'acceptation de la Constitution ? De déclarer que le coupable jugé gardera prison, et qu'en cas d'hostilités de la part des puissances, le jugement, quel qu'il soit, scra exécuté ? Quand le peuple aura une Constitution, il n'y aura pas de secousse à craindre, ni de division à espérer; et alors votre justice prononcera sans égards aux circonstances: quant à la guerre qui s'apprête, il me semble d'une politique sûre de placer les rois dans cette alternative sur laquelle j'appelle votre attention, ou d'attendre que la république soit organisée avant de vous attaquer, ou de s'ôter tout prétexte de rallier eux-mêmes tous les partis autour de vous en vous attaquant. Ce n'est point au tribunal, c'est au corps politique que je présente ces observations: plus je les balance, moins elles me paraissent de nature à être négligées. Les troubles actuels de l'intérieur ne m'effraient pas: une loi, une seule véritable loi, un article constitutionnel présenté, la déclaration des Droits à la discussion, suffisent pour les calmer. On nous calomniera: que toute notre activité soit employée pour le bien; améliorons de toutes nos forces le sort de l'indigent; celui de ces braves soldats livrés à tous les hasards et abandonnés à tous les besoins; et la calomnie se taira ou sera sans effet: j'ose le dire, ayons continuellement leur déplorable sort devant les yeux, et nos passions et nos haînes feront silence; la justice, l'humanité et la pitié nous réuniront. Mon opinion est qu'après avoir été à l'appel nominal sur la question de conviction et sur l'application de la peine, la Convention nationale décrète, 10. que la question de la confirmatiou du jugement, par la Nation, EST AJOURNÉE à l'époque, soit de la paix générale et de la reconnaissance de la République par les puissances européennes, soit de l'acceptation de la Constitution par le peuple; et que, jusqu'à ce, il soit surcis à l'exécution du jugement; 20o. qu'en cas d'hostilités et d'invasion sur notre territoire, l'intérêt national exigeant qu'on ôte aux malveillans de l'intérieur le chef que les armées étrangères vien-draient leur rendre, et que la Nation toute entière soit réunie à la puissance qui la représente, le jugement, quel qu'il soit, sera exécuté; 3o. que le ci-devant roi jugé demeurera, ainsi que sa famille, jusqu'aux époques prévues, en état de réclusion, et sous telle garde qui sera déterminée. Telle est, citoyens, et mon opinion sur cette question trop long-temps débattue, et tels sont les motifs qui l'appuient. Il m'a paru, en un mot, que les considérations politiques invoquées s'appliquaient plus naturellement au genre de la peine à décerner et à son exécucution, qu'à la question de l'appel. J'ai exposé mes pensées sans appareil et sans prestige d'aucune passion, car il m'importe sur-tout de ne pas me faire illusion à moi-même, et je ne veux aider à abuser personne: si je me trompe, mon erreur est à moi: mais si j'ai cherché la vérité de bonne foi; si mon erreur est involontaire, ses suites pourraient-elles m'être imputées à crime? Je n'ai point dit ici quelle peine j'appliquerais dans le cas de conviction: un juge ne peut prononcer qu'à l'instant où il vote. CHAPITRE CII. Résultatdes différentes opinions prononcées à la Convention nationale , par J. B. LABOISSIERE. : IL paraît jusqu'ici que la vie ou la mort de Louis, surnommé le dernier, ne sont plus parmi nous qu'une affaire de politique. Je n'ai rien lu, rien entendu dans cette tribune qui dénote le plus léger soupçon de son innocence. Il n'y a pas jusqu'aux défenseurs de cet accusé qui ont eu recours à de misérables évasions, à des restrictions mentales pour justifier ses parjures. D'où peut donc venir la diversité de nos opinions? Elle vient de la nature des circonstances, de l'importance du sujet, et non de l'esprit de parti, comme on s'efforce de le débiter. Elle vient du décret qui a détruit la royauté, en laissant subsister un roi qui n'était que suspendu. Elle vient, cette diversité d'opinions, de l'établissement d'une République dont les bases ne peuvent être consolidées que par la sanction du peuple, puisqu'il n'est point de constitution s'il ne l'approuve. Tous ces faits sont constatés par nos re |