Bientôt cette limitation parut trop large encore, et un décret de 1808, motivé sur les abus et les désordres contraires à l'intérêt public, réduisit à 150 le nombre des avoués près le tribunal de première instance de Paris, qui s'élevait à 262. Une suppression analogue fut opérée ensuite à la Cour royale et aux autres Cours et tribunaux de France. Ainsi, Messieurs, ce qu'on vous demande aujourd'hui comme un développement de principes de liberté, ne serait autre chose que recommencer la série des tristes essais, dont une expérience, qui existe pour eux, a démontré les dangers. Après avoir traité la question d'ordre public, je laisserai de côté une foule de considérations particulières, résultant des droits acquis, me contentant d'observer que pour qu'une profession soit hono rable, et celle des avoués a besoin de l'être, il faut que ceux qui l'exercent y trouvent un moyen d'existence assuré, ce qui ne peut avoir lieu que par la limitation du nombre en proportion de celui des affaires. Les mêmes considérations, et avec plus de force encore, sont applicables aux places de notaires, distribuées et maintenues, disent les pétitionnaires, avec le caprice le plus scandaleux. Il convient donc, pour repousser de pareils reproches, que la chambre me permette de considérer les notaires, sous les divers rapports qu'ils offrent à la société, comme fonctionnaires publics, et, suivant la belle expression de Réal, conime juges volontaires des parties. D'abord, aux termes de la loi, les notaires sont des fonctionnaires publics chargés de recevoir les actes auxquels on veut donner l'authenticité des actes de l'autorité publique. Des devoirs, beaucoup plus que des priviléges, résultent pour eux du caractère légal qui leur est attribué: les priviléges sont pour leurs actes, les conditions pour leurs personnes: en effet, est-ce un privilége personnel qu'une résidence obligée que le notaire ne peut changer, sous peine de destitution? Sont-elles un privilége ces limites posées à l'exercice de leurs fonctions, sous peine, s'ils les dépassent, d'encourir la suspension, la destitution et même des peines infamantes, si l'infraction les entraîne dans une faute plus grave? Est-ce un privilége que d'être assujetti à fournir un cautionnement? Il serait difficile de voir dans ces conditions autre chose que ce qu'elles sont, des garanties. On sait combien de malheurs de fortune peut entraîner l'imprudence d'un notaire, malgré la surveillance des chambres de discipline, si honorables dans leurs soins, pour prévenir ou réparer ces malheurs; comment après un e telle expérience pourrait-on proposer au gouvernement d'abandonner le notariat au libre concours et au rabais d'une concurrence illimitée ? Les pétitionnaires citent comme une preuve du caprice qui a présidé à la fixation du nombre des notaires, celui de 113 qui existait à Paris'en 16ta, et qui aujourd'hui ne s'élève qu'à 114; mais d'abord, ce nombre est encore supérieur à celui que, conformément à la loi de l'an 11, devrait avoir la ville de Paris, puisque sa population, fixée à 633,615 habitans, par suite du recensement fait en 1829, n'exigerait que 105 notaires à raison d'un notaire au plus par 6,000 habitans, taux fixé par la loi précitée. Ensuite, les pétitionnaires n'ont pas fait attention que si depuis 1612 le nombre des notaires n'a pas augmenté à Paris, celui des affaires de leur compétence y a beaucoup diminué, ce qui révient au même ; et en voici les principales causes, si la chambre me permet de les lui remettre sous les yeux. Tous les emprunts, soit pour l'État, soit pour les communes, soit pour les établissemens publics, se faisaient par le ministère des notaires; aujourd'hui ces emprunts sont devenus étrangers aux notaires. Les actes des notaires de Paris étaient exempts du contrôle, privilége qui, joint à celui qu'ils avaient de pouvoir instrumenter par toute la France, leur attirait une foule d'affaires de tous les points du royaume. Aujourd'hui, leurs actes sont soumis au contrôle, et leur exercice restreint dans l'étendue de la cour royale, et de fait à l'enceinte de Paris, à cause des études extérieures; les changemens survenus dans la législation sur les héritages ont encore contribué à restreindre les attributions des notaires. Il résulte de ces causes que, malgré l'accroissement de la population, les notaires de Paris reçoivent aujourd'hui beaucoup moins d'actes qu'avant la révolution. Quant à la différence qui existe entre le nombre des notaires dans différentes villes de populations analogues, telles que Orléans, Caen, Rouen et Bordeaux, différence que les pétitionnaires citent comme le résultat de grands abus, cette différence tient à des causes fort naturelles et s'explique par la différence de législation qui était autrefois en vigueur dans ces mêmes villes. Ainsi Rouen et Caen étaient régies par la coutume de Normandie qui, excluant la communauté, et défendant rigoureusement les droits des femmes et leurs apports, rendait fort simples les opérations résultant de la disposition des mariages; le régime dotal a continué en Normandie. A Orléans et Bordeaux, au contraire, le régime de la communauté a été adopté; par suite, les transactions y sont plus nombreuses et le ministère des notaires plus nécessaire. Ces exemples, cités par les pétitionnaires eux-mêmes, concourent donc à prouver qu'au lieu d'être l'œuvre du caprice, le nombre et la distribution des études de notaires esten raison des besoins de la population. Si, passant à des considérations d'ordre moral, on vient à considérer les notaires comme les juges volontaires des parties, comme les confidens et les conseils de leurs cliens dans les affaires les plus délicates, les dépositaires des secrets de famille; si on les voit préparant les contrats de mariage, constatant les donations entre-vifs, recevant les dernières volontés des mourans; on conçoit l'importance de telles fonctions sociales; et on se demande ce que deviendraient tant d'intérêts divers, ce que deviendrait la confiance qui a formé les dépôts au travers des générations, si les vœux imprudens des pétitionnaires étaient réalisés. Votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour. Séance de la chambre des Pairs du 23 janvier 1851.Rapporteur, M. le comte Tascher.-Président, M. Pasquier. COUR DE CASSATION, NOTAIRE. OFFICIER MINISTÉRIEL. - CHARGE. - VENTE. - PRIVILEGE. Le notaire vendeur, qui rachète son étude, a sur le prix du rachat, pour ce qui lui reste dû sur la vente primitive, le privilége déterminé par l'art. 2102 no 4, С. С. (1) (Auger (les créanciers d') C. Vandey) Nous avons rapporté l'arrêt de la Cour d'Orléans dans notre tome 36, p. 274; nous l'avons accompagné de la savante discussion de M. Légier, et de nos observations. Devant la Cour de cassation, M. Laplagne-Barris, avocat-général, vu la gravité de la question, avait conclu à l'admission, parce que selon lui, la loi n'établissait pas de privilége; mais, après une délibération très longue et fort animée, la Cour a consacré notre opinion dans l'arrêt qu'on va lire. ARRÊT. , LA COUR; -Vu les art. 516, 529, 535 et 2102, § 4, C. C. - Attendu que le 21 décembre 1821, le sieur Vandey vendit au sieur Auger son étude de notaire, à la résidence de Blois, et la clientelle qui y était attachée, moyennant la somme de 63,000 francs, stipulée payable dans les termes énoncés au contrat; Attendu que le sieur Auger tomba en déconfiture avant de s'être libéré envers le sieur Vandey, et lui rétrocéda l'office et la charge de notaire, moyennant le prix qui serait arbitré par la chambre des notaires, sans rien préjuger sur le privilége; Attendu que, s'il est vrai qu'un notaire n'ait pas la pleine propriété de son titre, et que ce soit une fonction qui ne peut être exercée qu'avec le consentement du prince, il est vrai aussi que le concours des deux volontés légalement autorisé par la loi du 28 avril 1816, a été depuis cette loi constamment reconnu, et le droit de désigner un successeur au titulaire décédé est même reconnu à ses héritiers; peu importe donc le concours de deux volontés; c'est toujours un contrat de vente où se trouvent les trois choses essentielles à ce contrat, res, (1) V. J. A., t. 39, p. 55. XL. pretium, consensus; d'où il résulte que la chose vendue étant certaine, reconnue et encore en la possession de l'acquéreur, le vendeur qui n'en a pas reçu le prix, peut facilement exercer le privilége naturel et juste du vendeur sur la chose vendue, si d'ailleurs la loi l'y autorise. Attendu quel'art. 2102 du Code civil déclare, § 4, créance privilégiée, le prix d'effets mobiliers non payés, s'ils sont encore en la possession du débiteur, et qu'il se réfère nécessairement aux art. 529 et 535, d'après lesquels les droits incorporels sont réputés meubles sous la dénomination d'effets mobiliers, puisque la même expression est littéralement employée par le législateur, dans les art. 535 et 2102, § 4, ce qui n'est au surplus que la conséquence de l'art. 516 qui porte que tous les biens sont meubles ou immeubles. Attendu qu'une étude de notaire qui n'est évidemment pas un immeuble, se trouve nécessairement classée dans la loi sous l'expression d'effets mobiliers, et que dès lors, loin de violer la loi en accordant un privilége au sieur Vandey, la Cour royale d'Orléans en a, au contraire, fait une juste application; Rejette. Du 16 février 1831. 1 Ch. req. LOI. TRAITE. NOIRS. - RÉPRESSION. Loi concernant la Répression de la Traite des Noirs. LOUIS-PHILIPPE, etc. Art. 1er. Quiconque aura armé ou fait armer un navire dans le but de se livrer au trafic connu sous le nom de traite des noirs, sera puni d'un emprisonnement de deux ans au moins à cinq ans au plus, si le navire est saisi dans le port d'arme ment avant le départ. Les bailleurs de fonds et assureurs qui auront sciemment participé à l'armement, le capitaine et le subrécargue du navire, seront punis de la même peine. La poursuite ne pourra avoir lieu que lorsque la preuve du but de l'armement paraîtra résulter, soit des dispositions faites à bord, soit de la nature du chargement. |