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RAPPORT

DU

DÉVELOPPEMENT MENTAL AU DÉVELOPPEMENT FONCTIONNEL

CHEZ LA JEUNE FILLE AMÉRICAINE

ANALYSE DE 12,000 CAS DE PREMIÈRE MENSTRUATION

ÉTUDE PRÉLIMINAIRE

Par G. J. Engelmann, M. D. (Boston).

Je veux présenter ici un certain nombre de données qui ont trait à la première apparition de la menstruation et qui sont de nature à jeter quelque lumière sur la question encore non résolue des causes qui la déterminent.

On sait que la race, le climat, la constitution, la taille, la santé, que toutes ces conditions influent sur l'établissement de la puberté. Toutefois, nos connaissances sont sur ce point encore vagues, et ne sont guère plus avancées que ce qu'enseignait Brière de Boismont en 1842; que les études sur la menstruation présentées au Congrès international de médecine de Paris, en 1868, études devenues classiques et qui, en fait, représentent nos connaissances actuelles sur la question.

Leudet (de Rouen), Lagneau fils et Joulin (de Paris), Tilt (de Londres), Faye et Vogt (de Christiania), et Meyer (de Berlin), présentèrent d'importantes statistiques, soigneusement dressées et inestimables, comprenant les résultats obtenus par de bons observateurs en des contrées diverses, en des climats variés de l'équateur au pôle. Mais ils ne firent, en somme, que confirmer l'œuvre de Brière de Boismont, et n'apportèrent que bien peu de neuf, sauf qu'ils accentuèrent davantage l'influence de l'état social.

L'influence de plusieurs causes, des habitudes, du milieu sur le développement de la puberté est mise en évidence. Mais à aucune d'elles n'est reconnue une influence prépondérante; nul facteur étiologique n'est indiqué comme déterminant l'instauration de cette fonction importante, qui inaugure la vie sexuelle de la femme; nul n'est souligné comme expliquant clairement les variations dans la date de la première apparition du flux

menstruel.

Il en fut ainsi, je pense, parce que les données nécessaires pour une solution de cette question sont difficiles à obtenir. Les observateurs ont naturellement utilisé les documents qui leur étaient accessibles. Ces matériaux provenaient en partie de la pratique privée, surtout des hôpitaux, des dispensaires, et ils étaient invariablement groupés d'après les distinctions de classes sociales généralement adoptées. Or ces résultats, quoique corrects, sont défectueux; les notions sur lesquelles ils reposent étant incomplètes, et la classification étant aussi incomplète. On a fait toutes les classifications possibles: géographique, climatérique, de race, sociale, anatomique et pathologique, sauf une, psychique.

l'état mental

a été

Le facteur le plus important négligé : c'est de ce facteur que je vais m'occuper ici. Dans mes récentes études sur la menstruation avec aperçus sur l'influence des méthodes nouvelles d'éducation psychique et physique sur la santé fonctionnelle des jeunes filles en voie de développement, j'ai été fort aidé par l'intérêt actif qu'ont témoigné les personnes qui ont charge de nos grandes institutions pour l'éducation des jeunes femmes, principalement par celles qui s'occupent de l'éducation physique. De cette sorte, des données importantes et très nombreuses ont été accumulées, et des résultats multiples et intéressants qui en ont découlé, un des non moins intéressants est l'influence marquée de l'état mental, du stimulus mental et du milieu sur le développement fonctionnel.

Tous les auteurs, depuis de Boismont, signalent l'état social comme un des facteurs déterminants les plus importants du

développement précoce ou tardif de la jeune fille et de l'apparition de la première menstruation. On doit accepter cette donnée parce que, relativement, les mêmes conditions sociales se retrouvent dans les contrées diverses dont les documents statistiques sont utilisables. Cela paraît un fait hors de contestation, mais une explication n'a jamais été donnée, mais l'influence causale n'a jamais été établie. Mes observations personnelles indiquent la probabilité de semblables résultats, et expliqueront la variation de la date de la première menstruation par la variation de l'état social en Europe. Une classification basée sur la condition sociale: classes élevée, moyenne, laborieuse, est, dans les pays d'Europe, synonyme de degré d'éducation, de degré de développement mental. Plus élevée est la classe et plus grand est le développement de la force mentale et de l'élément psychique, facteur dont l'influence a été soupçonnée mais jamais établie. Emmet, dans son chapitre sur la puberté, dit : « Ce qui résulte clairement d'un pareil tableau, c'est l'influence manifeste du climat sur la précocité ou le retard de la puberté ! Mais mon impression personnelle est que les habitudes de race qui influencent le système nerveux sont les plus importants facteurs dans la détermination de l'époque de la puberté, et que le climat en lui-même a peu d'influence (1). »

Les quelques auteurs qui font quelque mention de l'éducation ou du développement mental s'expriment sur ce point de la même manière. Stoltz, dans son excellent et long article sur la menstruation dans le Dictionnaire de médecine et de chirurgie pratique, Paris, 1876, dit que « la race et la latitude sont les deux conditions qui exercent l'influence principale sur l'établissement de la puberté ; mais que dans la même race et sous la même latitude il est d'autres circonstances qui peuvent influer. sur la précocité ou le retard de l'instauration menstruelle: parmi elles, la vie à la ville ou à la campagne, l'éducation intel

(1) EMMET. La pratique des maladies des femmes. Trad. française, Paris, 1887, p. 122. R. L.

lectuelle et morale, ainsi qu'une quantité considérable d'autres conditions >>.

Dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, nous trouvons une manière de voir très rapprochée : « Toutes les conditions extérieures au milieu desquelles se trouve placée la jeune fille sont susceptibles, par leur continuité, de hâter ou de retarder la première apparition de ses menstrues. La température, ou plutôt le climat, représente une de ces conditions les plus importantes. L'habitation dans les villes ou dans les campagnes, de même que le mode d'éducation et le régime alimentaire, en représentent d'autres dont l'influence n'est pas moins réelle, quoique plus restreinte. »>

J'ai cité ces travaux parce qu'ils représentent un résumé complet des vues modernes; l'influence de l'éducation et du développement mental s'est évidemment imposée à ceux qui ont étudié la question. Mais elle n'a été signalée que d'une façon vague, en quelques mots, dans des énoncés généraux, imprécis; rien de positif, aucune donnée bien établie dans la littérature sur la question.

DÉVELOPPEMENT MENTAL, FACTEUR PRIMITIF, DÉTERMINANT LA
PRÉCOCITÉ OU LE RETARD DE L'INSTAURATION DE LA MENSTRUA-
TION. ANALYSE DE 12,000 CAS DANS LES
ÉTATS-UNIS.

La connexion intime entre le système nerveux et l'appareil de la reproduction est un des caractères de l'organisme féminin, et leur influence réciproque est des plus profondes. De même que chaque éruption cataméniale affecte fortement la personnalité mentale de la femme, ainsi l'état psychique affecte le molimen menstruel. Aussi, c'est, semble-t-il, une déduction naturelle qu'à cette période essentiellement impressionnable de la puberté l'état mental doit marquer son empreinte sur le développement fonctionnel et cela, mes observations le démontrent par des chiffres plus élevés que ceux dont disposent

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en général les observateurs, et suffisants pour être concluants.

Ces résultats sont basés sur l'examen de la première menstruation chez 12,000 femmes américaines (12,047), dont j'ai colligé moi-même 6,549 cas. Le total comprend une variété de groupements humains très différents, de l'Atlantique au Pacifique : Collège des filles de l'Est et de l'Ouest, 1,395; Écoles normales de régions variées de la campagne, 1,342; filles employées dans les magasins, 800; 2,315 cas concernant des femmes de la classe laborieuse d'une grande ville ont été colligés à mon dispensaire de Saint-Louis par mon ancien assistant, le Dr F.-C. Ameiss. Les classes élevées sont représentées par 697 cas de ma pratique privée à Saint-Louis; j'en ai réuni 5,498 provenant exclusivement des observations faites antérieurement dans cette région, 2,330 de la pratique privée du Dr Emmet; nous pouvons grouper celles-ci comme celles provenant de ma pratique personnelle en classes moyenne et élevée ; 2,503 émanent des recueils cliniques du dispensaire du D'Chadwick, et représentent les classes laborieuses de Boston; 665 proviennent du College Alumnæ, et datent de 1885.

J'examinerai les 12.000 cas, mes propres observations, avec celles que j'ai recueillies, parce que les observateurs dont elles émanent sont chez nous de très hautes autorités, les Drs A. Emmet, de New-York, et J.-R. Chadwick, de Boston, et que les résultats qu'ils ont enregistrés sont des documents tout à fait valables. Les données ainsi acquises portent sur la période de puberté chez les jeunes filles du College Alumne, consignées dans le recueil des Health Statistics of women College Graduate, objet d'un rapport au Comité spécial de l'Association of Collegiate Alumnæ et collationnés par le Massachusets Bureau of Statistics of Labor en 1885.

La précocité la plus grande de la première menstruation s'observe chez les jeunes filles dont le développement mental est le plus élevé, et qui vivent dans le milieu social le plus stimulant, collèges des jeunes filles, soit à 13 ans et demi. Et j'ai utilisé les 1,395 observations provenant de divers collèges, en négligeant les variations minimes, celles, par exemple, infé

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